Lors de l’annonce, en 2011, de la séparation de Sonic Youth, nous étions avant tout effondrés par la fin de l’un des plus grands groupes de l’histoire du rock, auteur d’une carrière de près de trente ans, exemplaire aussi bien en matière de productions artistiques que de l’intégrité de leur parcours, et dont l’influence sur l’évolution et l’histoire des musiques amplifiées se fait encore aujourd’hui ressentir. Nous ne pensions pas, à cette époque, que cette séparation aurait au moins un avantage : celle de nous permettre, trois ans plus tard, d’avoir accueilli au Ciel trois de ses anciens membres ! Après Steve Shelley, batteur hors norme dont le jeu incroyable est encore dans toutes les mémoires de ceux qui sont venus voir le groupe Disappears, et après Kim Gordon, cultissime égérie d’un rock sauvage dont le concert présenté en partenariat avec le Cabaret Frappé n’a pas démenti le caractère expérimental et radical, c’est donc Lee Ranaldo qui viendra nous présenter son projet solo. Membre fondateur de Sonic Youth, considéré comme l’un des plus grands guitaristes de l’histoire du rock, il aura mis un certain temps à concrétiser son projet de solo acoustique. «J’ai toujours été un joueur de guitare acoustique, depuis mes plus jeunes années, et je n’ai jamais arrêté». Mais si les morceaux de ses deux précédents albums solos étaient au départ composés en voix-guitare acoustique, ils étaient ensuite retravaillés en groupe. Prenant de plus en plus confiance en ses qualités de songwriter, et de plus en plus de plaisir à chanter, Lee Ranaldo a choisi pour la première fois de nous les livrer nus, dans des endroits choisis pour leur acoustique et leur intimité. Fan de David Crosby, Neil Young, Joni Mitchell, Bob Dylan et bien entendu de Leonard Cohen, il ne propose pas pour autant un songwriting classique : on ne sort pas indemne de tant d’années passées au sein de Sonic Youth, et même en acoustique, on retrouve un goût certain pour la dissonance et les expérimentations de toute sorte… Loin d’une reconversion, Lee Ranaldo semble profiter d’une liberté nouvelle : «Passer d’une écriture collective à une écriture personnelle a nécessairement pris un certain temps. Avec Sonic Youth, tout était décidé en commun, de l’écriture aux arrangements, sans se soucier de qui apportait telle idée. Maintenant, je me retrouve seul avec mon opinion, mon jugement. C’est quelque chose d’incroyable de travailler à quatre, où chacun contribue de manière égale à la réalisation des choses, et dans un sens, ça me manque, même si je prends un plaisir nouveau à chanter et à redécouvrir les possibilités d’une guitare acoustique».
C’est donc à un moment privilégié avec une légende du rock que nous vous convions, son passage de l’ombre à la lumière permettant de mieux saisir son importance au sein de Sonic Youth, à propos duquel Lee Ranaldo glisse : «On n’a jamais dit que c’était terminé. Ce serait cool de rejouer ensemble des vieilles chansons sur scène». C’est quand vous voulez, puisque trois d’entre vous connaissent désormais le chemin.

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